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Éva a lu pour vous ..

Chroniques littéraires

Une empreinte sur la terre

Pramoedya Ananta Toer ou Pram

Zulma

2018

669 pages traduites par Dominique Vitalyos

Historique

Chronique

2 février 2019

Troisième tome de la tétralogie ou Buru Quartet.« Le monde des hommes » et "Enfants de toutes les nations" sont les titres des deux premiers opus.


Début du XX ème siècle, Java, nous retrouvons Minke se présentant à l'école de médecine destinée aux indigènes. Éduqué, de par sa très grande intelligence et la position de son père, dans une école néerlandaise, donc à l'européenne, s'étant fait remarqué par ses premiers articles en néerlandais puis en malais, il est écartelé entre les deux civilisations, entre les deux langues. Il a adopté les vêtements des blancs mais arrivé dans ce lieu de formation, il doit reprendre les vêtements malais et rester pieds nus. Une insulte pour lui, tout ça pour être ensuite un médecin gouvernemental sous payé. Bien vite il comprend qu'être médecin n'est pas sa vocation.


Les articles qu'il a déjà écrits ont fait de lui une personnalité et lui ont permis de se créer tout un réseau de relations utiles. Ainsi est-il invité dès son arrivée à l'école à un repas en présence du gouverneur général des Indes néerlandaises et du vainqueur et boucher de la guerre d'Aceh. Les autochtones ont perdu, ont été massacrés. Bali sera la prochaine étape visée par les colonisateurs. La rencontre avec l'assassin hollandais ne sera pas la dernière, celui-ci étant nommé plus tard gouverneur général.

Minke intrigue énormément, autant ses frères que les occupants.


Son destin va basculer lorsque, pour honorer une promesse faite à un ami chinois décédé depuis, il ira porter la dernière lettre écrite par le défunt à sa fiancée. Il découvre une jeune fille délicate, certainement en mauvaise santé, vivant de rien dans ce pays étranger, enseignant le chinois et l'anglais à des enfants de compatriotes également exilés. Il tombe vite amoureux de Mei, qui sous sa fragilité cache une volonté de fer et œuvre dans l'ombre avec des camarades contre l'impératrice chinoise. Elle est aussi séduite par ce futur médecin dont elle ouvre peu à peu la conscience politique ; elle l'aide afin qu'il puisse trouver enfin sa place réelle entre indigènes, tous blancs, et sangs mêlés.


A partir de cet amour naissant, nous allons suivre le parcours psychologique, politique et patriotique de Minke : en 1906 il crée, inspiré par Mei, une association du nom de Syarikat Priyayi, qui est légalement une personne juridique égale à n'importe quel individu européen. C'est d'abord un succès : un journal, une fondation, des écoles, une assistance juridique et sanitaire voient le jour.


Mais Minke a commis une erreur en n'invitant que des priyayis, des indigènes éduqués travaillant pour l'administration néerlandaise, car ceux-ci vivant dans une certaine sécurité, dépendant du pouvoir en place, cultivent une nonchalance coupable. Il aurait dû destiner cette association aussi aux agriculteurs, commerçants, entrepreneurs, étudiants. Les priyayis ne payent pas leurs cotisations, les fonds manquent.


Malgré cela, les idées véhiculées par le journal en malais qui deviendra un quotidien sous le nom de Medam lu jusqu'à Paris, inquiètent les autorités et en particulier le nouveau gouverneur général des Indes. Il tente de circonvenir Minke en vain, puis des menaces se font plus précises et d'anciens ennemis refont surface, entre autres un sang mêlé, envieux des succès et de l'intelligence de cet indigène ne sachant resté à sa place. La guerre contre Bali commence, les consciences de tous, surtout celle de Minke, enfin clair avec lui-même et ses frères, se réveillent s'inspirant de " liberté égalité fraternité" gravé aux frontons des mairies françaises. Le combat pour l'indépendance est à ses débuts.


Un troisième tome de ce Buru Quartet passionnant, plus aisé à lire peut être parce que je suis maintenant familiarisée avec ce style littéraire un peu précieux, dans les dialogues principalement, illustrant ainsi parfaitement ces années 1900 et la

complexité des traditions de respect et de hiérarchie malaisiennes. Lorsqu'on relit la biographie de Pramoedya Ananta Toer, on est d'autant plus admiratif de l'auteur et de son œuvre majeure et essentielle pour l'humanité entière, défendant la liberté et l'indépendance de son île, de ses compatriotes. Une fresque historique nécessaire !

Quatrième de couverture

Enfin la terre de Betawi se déploie sous mes pieds. J’inspire profondément l’air du bord de mer. Adieu, navire, adieu, mer, adieu à tout ce qui fait partie du passé, sans excepter les expériences des jours sombres. Adieu. Je pénètre l’univers de Betawi et j’entre dans le XXe siècle. À toi aussi, XIXe, adieu ! Je suis venu m’affirmer, chercher la grandeur et le succès. » Voici Minke en homme nouveau. Laissant derrière lui Surabaya pour la capitale des Indes néerlandaises, il entre à l’école de médecine – la seule école supérieure ouverte aux Indonésiens. Triste reflet du système en place : Minke doit renoncer à ses vêtements européens pour se vêtir à la mode javanaise, et marcher pieds nus. Où que Minke se tourne, même dans les cercles hollandais réformateurs, il se heurte au mur de la domination coloniale, à l’exploitation des terres et des hommes au service de l’industrie sucrière. Mais le sésame est ailleurs – dans cette lettre qu’il doit remettre à Mei, une jeune chinoise militante. Grâce à elle, Minke passe à l’action : il crée un premier syndicat, une association pour l’éducation des masses, un journal indépendant en malais ...
L’heure de la révolution a sonné !

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