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Éva a lu pour vous ..

Chroniques littéraires

Un homme libre ?

Jean-Jacques Auché

MVO

Le 10 octobre 2024

173 pages.

roman

Chronique

24 mars 2025

                   En hommage à Gaby,

           Qui a fait le choix de vivre ainsi 


" Un clochard m'a dit 

Je suis millionnaire 

Un clochard m'a dit 

Moi je mène la grande vie 

J'ai fait de Paris mon petit pied-à-terre 

Et quand vient l'hiver je descends dans le Midi


Laisse laisse laisse gémir les grincheux 

Chante chante chante chante tant que tu peux 

L'amour la fortune tout le tremblement 

Au clair de lune ça vient en chantant... "

Maurice Chevalier, "Un clochard m'a dit ":


Nous passons tous chaque jour devant des femmes et des hommes assis par terre avec leurs coupelles attendant notre obole. Quelques fois, logés dans des foyers ou même dans leurs familles, généralement sans domicile fixe. Certains regards s'échangent... parfois ; certaines amitiés se nouent... parfois ; mais bien souvent c'est l'indifférence, le mépris, la peur ou la timidité qui priment.


J'habite une ville où la disparition d'une des nôtres, Mme Monique, faisant la manche depuis des années dans le tunnel menant au métro, n'a laissé personne indifférent. Je bénis le ciel de l'avoir revue avant son décès, d'avoir été en avance pour un RDV et d'avoir pu m'asseoir à côté d'elle et son ami Momo au soleil, d'avoir échangé sur la vie et nous être embrassées avant que le tourbillon ne me happe à nouveau. Pendant des semaines, des bougies ont été allumées à son ancien emplacement et ça nous a fait du bien collectivement, oui, car elle était une des nôtres. 


Plusieurs questions se posent toujours : 

- Que ferais-je si cela m'arrivait ? 

- Quels événements sont survenus dans leur vie pour être aujourd'hui dans la rue ? 

- Pourquoi certains, qui pourtant ont un toit, ( il y en a deux dans ma ville), continuent à mendier ? 

- Cela peut-il être un choix de vie ? Rejet d'une société normative, contraignante, se posant en juge et partie ?

- Comment cela se passe-t-il en province, dans les agglomérations où tout le monde se connaît ? 


Grâce à ce très beau texte sensible, bouleversant et profondément humain, Jean-Jacques Auché nous permet d'aller à la rencontre de l'un d'entre eux afin de comprendre sa singularité ; nous avons alors le privilège de partager ses rêveries, ses pensées, ses convictions profondes sur l'existence. Nous touchons ainsi à la vérité absolue de tout être par le biais d'un homme à part, apparemment marginal, apparemment asocial, non intégré...


La fracture par laquelle passe sa lumière s'est élargie avec son envie irrépressible de liberté.

Mais comment définir ce mot si vaste, au nom duquel tant de révolutions politiques, artistiques, civilisationnelles ou intimes ont été menées. 


Gaby a choisi la rue par conviction sincère. Mais ne s'est-il pas fourvoyé ? Le désespoir le prend malgré l'amitié de Robert, malgré la gentillesse de certains. Heureusement l'arrivée d'un berger allemand qu'il appelle immédiatement Frankiz (liberté), lui redonne l'élan, l'envie. 

Et nous l'accompagnons tout au long d'une vie de routine ponctuée de moments de grâce lorsqu'il décide par exemple de chanter de grands titres du répertoire français ou qu'il imagine suivre tel ou tel passant et partager avec lui un instant hors du temps. Ainsi René le clown, Franck le commercial, Clémentine la danseuse, et bien d'autres entrent dans la boucle.


Et justement, la traversée du miroir avec Gaby comme guide, se métamorphose en poésie pure, en magie, un retour à l'enfance, à la pureté bienfaitrice alors que la vie d'un clochard est usante, dangereuse, destructive. 

Comme écrit sur la couverture, Gaby a choisi cette vie par peur, sans savoir ce que cela signifiait vraiment.

Est-ce l'échec d'un homme ou de toute une société ? 

Quatrième de couverture

L’auteur nous invite à entrer dans l’intimité d’un « homme de la rue » :
Gaby n’est pas si vieux. Il a quarante-sept ans. Il donne l’impression d’être un homme fatigué. Il est vouté comme un vieillard. Son visage est rond. Ses yeux tendent vers une couleur noisette. Il fronce souvent les sourcils ce qui lui confère un air peu aimable. Il ressemble à ces rochers gris, presque noirâtres, qui résistent aux vagues de l’océan.

Gaby propose au lecteur une réflexion, un regard sur sa propre vie :
Mais que nous reste-t-il à nous les clochards si nous ne pouvons pas vivre dans un monde imaginaire ? Ce serait comme un prisonnier dont la peine deviendrait incompressible, sans aucun espoir !
Un conte humaniste poétique et plein de délicatesse.

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