
Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
SEL
Jussi Adler Olsen
Albin Michel
25 mai 2022
560 pages, traduites par Caroline Berg
Thriller et Policier
Chronique
25 juin 2022

Jussi Adler Olsen est un marathonien hors pair capable tout au long d'une série policière de 9 épisodes de soutenir notre intérêt sans aucune baisse de tension. Chaque enquête est unique, exceptionnelle et forme un tout cohérent avec le reste des opus. Peu à peu, se dessine devant nos yeux de fans absolus la trajectoire de chacun des membres du Département V. Comme l'auteur a réussi à créer un lien réel presque personnel entre nous et Carl, Rose, Assad et Gordon, nous tremblons pour eux, nous nous investissons émotionnellement dans ce récit qui par ailleurs est un thriller de haute volée où de mystérieux petits tas de sel de table sont le fil conducteur entre des victimes jusque là jamais reliées. Le contexte : anxiogène au possible dans un pays frappé par la pandémie qui bénéficie de quelques jours sans confinement en cette veille de Noël sombre, dramatique, crépusculaire. Heureusement, l'humour bon enfant et joyeusement absurde est toujours au rendez-vous et allège considérablement l'ambiance de fin de monde. Une femme de soixante ans, Maja, est retrouvée, suicidée chez elle par une de ses amies. Ce nom, Marcus, le supérieur hiérarchique de Carl Mørk, n'a jamais pu l'oublier. Il y a dans la carrière d'un policier une affaire qui vous hante toujours car non résolue et particulièrement bouleversante. C'est le cas du dossier de cette Maja qui a perdu tragiquement son fils lors d'une explosion dans un garage où sa voiture était en réparation. Marcus rafraîchit la mémoire de Carl qui était arrivé sur les lieux de la catastrophe dans les premiers et avait découvert la dépouille de l'enfant. C'est un dossier parfait pour le Département V, un cold case qui fera oublier un peu à Assad ses ennuis de famille, et à tous ce foutu covid. Mørk nouvellement papa est évidemment particulièrement touché par cette histoire qu'il n'a jamais pu mettre de côté. Très rapidement, cependant, l'affaire devient épineuse.... Il semble que du sel soit retrouvé sur d'autres scènes de crimes. Notre équipe formée d'êtres si cabossés ou inadaptés, à nouveau redevient un groupe d'élite qui décrypte les éléments et soulève des évidences que personne jusque là n'avait détectées. Parallèlement, Carl est dans l'oeil du cyclone sans le savoir... La foudre qui, en ce début d'épisode, s'est abattue sur un groupe d'étudiants en tuant tout le monde sauf une jeune femme voici trente ans, va encore frapper. La vieille affaire du pistolet à clous va refaire surface et plonger Carl dans la tourmente. Le Département V n'a donc pas beaucoup de temps devant lui pour résoudre le dossier qui s'alourdit de nouvelles morts inexpliquées à chaque jour qui passe. Un Serial Killer semble éliminer des cibles auprès desquelles il laisse du sel depuis des années.... Un neuvième épisode prodigieux, à la hauteur de tous les autres, méticuleux, magistralement organisé et imaginé qui nous laisse au bord du gouffre et en apnée jusqu'au prochain tome. Jussi Adler Olsen est un sadique ! Mais pas seulement, c'est celui qui pose toujours les bonnes questions ; ici il traite d'un sujet extrêmement douloureux et délicat : la haine qu'inspirent en ce moment tous les puissants cyniques, inhumains, tous les gouvernements irresponsables sourds aux cris des peuples, à leur souffrance, du haut de leur forteresse, peut-elle gonfler à un tel point que les barrages de la morale puissent céder et tout emporter ? Cela serait-il condamnable ou en quelque sorte de la légitime défense ?