top of page
IMG20230707173456_edited.jpg

Éva a lu pour vous ..

Chroniques littéraires

REPÈRES - Récit initiatique

Astrid-Aimé

Auto édition

2021

312 pages. Préface de Pierre Duterte

Autobiographie

Chronique

7 août 2022

"Le manque du pays fut si grand qu'il cumulait causes et solutions de tous mes maux. Ô Cameroun, berceau de mes ancêtres." La préface signée Pierre Duterte commence par : " S'écrire. Une libération ?" Tout est dit dans cette simple question ; tous ceux qui envisagent ou s'interrogent sur la nécessité ou l'utilité de raconter son parcours, sur le bénéfice ou le danger de remettre en sang les cicatrices que l'on croyait fermées, trouveront dans ces lignes l'expression de leur douloureux dilemme. Vais-je me jeter à l'eau ? Serai-je capable de nager jusqu'à l'autre rive ou vais-je couler, écrasé par le traumatisme ravivé ? Il suffit d'un regard, d'un mot, d'une jaquette de livre ou d'une quatrième de couverture pour que tout remonte du gouffre de nos peines, de nos douleurs, de nos manques. Ce fut le cas pour moi avec "Repères" au dernier Salon du livre de Paris. Entouré d'une multitude de pile de romans et ouvrages aux couleurs explosives, un îlot gris ardoise se distinguait : le portrait d'éléphant en couverture me fit basculer dans un hier lointain et pourtant présent à chaque minute. La lecture du résumé de ce récit initiatique me mit en apnée. La dédicace de l'auteur me rappelle que Oui, nous nous sommes parlé, mais déjà j'étais passée de l'autre côté, en état second. J'ai vite dû trouver la sortie.... Que de bravoure a-t-il fallu au petit garçon caché dans le jeune homme Astrid pour chuchoter à celui-ci que c'était le moment, qu'il allait falloir l'un et l'autre se prendre par la main pour raconter leur histoire, mais aussi celle d'un pays dans la tourmente, pour narrer l'exil, le sentiment d'abandon, le froid, la solitude, la tristesse abyssale ? Aucun son n'a pu s'échapper des lèvres serrées de l'enfant traumatisé, en position de défense constante, de vigie guettant les dangers potentiels, jusqu'à la rencontre salutaire avec un thérapeute, le même qui offre en préface à l'auteur ses mots clés : ainsi nous aussi pouvons-nous, dans le sillage d'Astrid-Aimé, ouvrir les portes de notre compréhension émotionnelle, de notre empathie, et entamer notre propre apprentissage. "Pour moi seul les fous allaient chez le psy. Mais il me rassurait en me faisant comprendre qu'il fallait exactement dire dans son cas "psychothérapeute" et que je ne devais aucunement me croire plus fou que lui. Tous les décors de ce bureau peu commun donnaient l'impression d'être à mi-chemin entre l'Afrique, l'Amérique, l'Asie et le Moyen-Orient. Au cours de nos conversations d'environ une heure, nous voyagions sur une pirogue la nuit auprès d'éléphants en bord de fleuve, sous le hululement des chouettes." Garçon perdu entre deux continents, entre deux parents, entre deux vies, entre deux ethnies, la colère peu à peu de ne pas comprendre les tenants et aboutissants de l'histoire familiale monte et se transforme en fureur. Les cris et les pleurs qu'il ne peut pousser deviennent coups et violence tempétueuse ; écartelé entre une mère déboussolée, dure et défaillante, abdiquant devant des compagnons toxiques, au grand dam de ses enfants, et le souvenir flou d'un père resté au Cameroun que l'on charge de tous les défauts, le petit Astrid puis l'adolescent cherchent dans la castagne à se faire mal, dans la délinquance à tester les limites de ce monde injuste, cynique, intolérant, absurde. Besoin d'un père, de repères.... Mais la société change et l'écrivain en devenir aussi ; les mots l'habitent à travers le rap, les livres, les chansons de variété française, américaine et africaine. Le besoin de coucher sa vérité noir sur blanc devient irrésistible, encore plus depuis sa rencontre avec Pierre Duterte. Se raconter en dehors de cette présence tutélaire se meut en urgence alors que la révolte populaire gonfle et se déchaîne enfin dans les rues françaises. L'espoir d'un changement nous étreint alors, on peut se permettre, peut-être, de penser à un avenir possible, l'horizon s'ouvre... "La vérité n'a de sens que si son récepteur parvient à la comprendre." Earl Simmons (DMX), 18/12/1970 - 09/04/2021 Mais pour bâtir le futur encore faut-il que les fondations intimes soient solides : comment le pourraient-elles alors que le brouillard des mensonges, des secrets, interdit toute clarté. L'hiver approche, rester en France à Goussainville, banlieue parisienne mal-aimée et déconsidérée est inenvisageable. Direction le Cameroun, enfin ! L'enfant doit interroger son père, connaître la/sa vérité, inspirer à nouveau les parfums de son pays, revoir les paysages, le quartier, la maison, retisser les liens avec la famille maternelle et paternelle, rendre hommage à sa grand-mère "véritable sainte" à laquelle cet ouvrage est dédié... La colère et la tristesse du petit garçon doivent laisser place à la paix intérieure et la compréhension bienveillante des actes de chaque intervenant de la pièce qui s'est jouée depuis sa naissance jusqu'à ce retour aux sources. Cette autobiographie, preuve que l'auteur y est parvenu, est aussi une oeuvre littéraire à part entière, singulière, flamboyante, érudite tout en étant familière, qui réinvente la langue, notre langue. Je retrouve le français d'outre-mer lumineux, respectueux de l'étymologie des mots, de leur sens premier, oublié en métropole. Le plaisir de les lire est intense, presque gustatif comme la fameuse madeleine.... Les larmes ne sont jamais bien loin, celles de la mélancolie, du manque, de l'absence mais aussi du bonheur retrouvé.

Quatrième de couverture

Dans un monde en perpétuel changement, à mi-chemin entre essai et récit initiatique, embarquez pour un authentique retour aux sources.
Découvrez le parcours d'exil tumultueux et troublant d'un jeune homme en quête d'identité.
Au croisement de ses racines africaines et françaises, Repères lève le voile d'un Cameroun empreint de pudeur et de nondits.
Du rire aux larmes et de surprises en déconvenues, sagesse et déraison s'entrechoquent dans une véritable ode à la résilience.
L'auteur, par sa plume incisive et sincère, décrypte sans langue de bois l'environnement qui l'a façonné.
À travers sa trajectoire saisissante, Astrid-Aimé tente de répondre à une question essentielle : comment comprendre et s'adapter à une société, quand on ne dispose d'aucun repère ?

bottom of page