Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
Madame Pylinska et le secret de Chopin
Eric-Emmanuel Schmitt
Audiolib
2018
2 h 22, lu par l'auteur
Roman
Chronique
28 mai 2019
L'auteur est prodigieusement accompagné au piano par Nicolas Stavy.
Somptueux ! Après les titres :
- Oscar et la dame rose
- Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran
- L'enfant de Noé
- Le sumo qui ne pouvait grossir
- Les dix enfants que madame Ming n'a jamais eus
tous parties intégrantes du Cycle de l'invisible, (disponibles chez Audiolib), nous voici plongés dans les aventures pianistiques, musicales, échevelées ou toute en intériorité de Éric, souhaitant un beau jour, quelle drôle d'idée !?!, réussir à jouer correctement Chopin.
Les autres compositeurs qu'il a découverts et interprétés, Bach, Schubert, Schuman, Beethoven, Debussy, Fauré, etc...ils les a compris, a su les jouer. Sa décision d'apprendre le piano, alors que cet instrument lui semblait jusque là un animal dangereux, disgracieux et encombrant dans le salon familial, est intervenue après que sa chère tante Aimée se soit assise à l'instrument et fait sonner enfin l'objet tel qu'il le fallait. Immédiatement, sous le charme de cette révélation totale, de ce choc émotionnel, Éric s'y met mais bientôt se trouve devant une falaise infranchissable : Chopin !!!
Le voilà donc devant la porte de madame Pylinska, qui bien plus qu'un simple professeur de piano va l'emporter sur un chemin initiatique tortueux de la Vie. Comprendre Chopin c'est entrevoir pour elle la vérité de l'existence. Et en cette matière, elle est monothéiste, alors qu'Éric avoue être plutôt polythéiste, ne pouvant s'empêcher d'aimer également d'autres compositeurs.
Extrémiste dans sa pensée, l'enseignante l'est aussi dans ses méthodes : voyons donc ! Apprendre à jouer d'un instrument sans y toucher !?!
Elle va peu à peu imposer ses exigences au jeune homme qui jusque là était un peu coincé. Elle va l'emmener dans des contrées lointaines et intérieures de l'amour, de l'insoumission, de l'exacerbation des sentiments et des ressentis. Il va laisser tomber des morceaux de son armure éducationnelle ou de circonstance pour devenir un Homme libre, un Homme capable de choisir ensuite la vie qu'il veut, la compagne qu'il souhaite....
Par Chopin, par la musique, madame Pylinska sauve Éric d'un futur bien terne et nous rappelle à nous tous, musiciens ou non, les fondamentaux afin de vivre pleinement.
Un texte très beau, au style simple, direct, délicat. Beaucoup de poésie et de fantaisie, beaucoup de situations improbables, drolissimes et oniriques. Le tout illustré par la voix ou plutôt les mains et l'esprit du pianiste concertiste Nicolas Stavy.
Un moment donc d'exception, rare, une partition que les deux artistes jouent à la perfection ; au répertoire du Chopin évidemment, mais aussi un Liszt et un Schumann à quatre mains.
Quant à la lecture elle-même, un vrai bonheur, la voix de Éric-Emmanuel Schmitt étant jeune, claire, d'une précision de prononciation incroyable. On sent qu'il s'amuse à camper tous ses personnages et en particulier madame Pylinska, une Alice Sapritch aux accents polonais. Un bonheur donc.... Une leçon de vie... J'ai une furieuse envie du coup d'ouvrir mon piano....