top of page
IMG20230707173456_edited.jpg

Éva a lu pour vous ..

Chroniques littéraires

Les Immortelles

Makenzy Orcel

Zulma

2012

134 pages

Roman

Chronique

31 décembre 2018

Prix Thyde Monnier de la Société des Gens de Lettres.

Magnifique mise en page pour un long poème en prose, charnel, unique, furieusement engagé à rendre hommage aux Immortelles de la Grand-Rue à Port-au-Prince, avant et après le terrible tremblement de terre de janvier 2010.


« La petite. Elle n'est pas morte. Elle n'a pas le droit de mourir. Je sens encore son odeur dans tout ce qui bouge. C'est l'odeur de catastrophe, l'odeur des cadavres qui monte de la rue, de tout ce qui bouge. Tous les monstres en béton sont tombés. Tous les bordels. La Grand-Rue n'est plus ce qu'elle était. Mais nous, on ne mourra jamais. Nous, les putains de la Grand-Rue. Nous sommes immortelles. »


Et le meilleur moyen de faire en sorte que jamais elles ne meurent ou soient oubliées est celui choisi par la narratrice rescapée de cette catastrophe, racontant à un écrivain l'arrivée de la petite à sa porte, se nommant Shakira, passionnée de littérature, et souhaitant se prostituer pour gagner à ses yeux une forme de liberté, mais aussi une revanche sur sa mère qu'elle hait. Il est beaucoup question de maternité, du chiffre douze qui revient régulièrement, de prescience du malheur, de l'écroulement des illusions comme des murs de la cité, nous sommes en pleine tragédie...Hypnotique lorsqu'il est lu à haute voix, tel un chant sans âge, ce texte authentique dans sa démarche, lyrique dans sa forme, sans pruderie inutile ou faux semblant devient essentiel et universel..


« Aux lendemains du tremblement de terre qui a secoué Port-au-Prince avec la même force destructrice que la bombe d'Hiroshima, Makenzy Orcel a écrit Les Immortelles pour dire la folie de vivre malgré l'épouvante autant que pour livrer le plus insolent témoignage face à l'apocalypse. »Ce livre est son premier roman. J'ai beaucoup pensé à ces photos de fouilles archéologiques dans des villes détruites par des catastrophes naturelles, ou retrouvées après des millénaires... des clichés présentant les squelettes dans des lieux anciennement cachés comme les lupanars ou les lieux d'aisance ou les bains publics. L'intimité la plus secrète voire honteuse mise à jour soudainement sans pudeur. Et cela est terriblement beau, pour certains transgressif.


Lorsqu'en plus, on apprend les circonstances de l'agonie lente et insupportable de Shakira, et les raisons pour lesquelles

elle n'était pas au turbin dehors, mais dans un des bâtiments qui sera son cercueil, notre coeur éclate. La symbolique est puissante !

Un roman poétique court, cruel, bouleversant. Pour que la mémoire reste intacte.

Quatrième de couverture

Les Immortelles, ce sont les prostituées de Port-au-Prince. L’une d’elles prend à parti l’inconnu monté la voir au bordel. Apprenant qu’il est écrivain, elle lui propose un marché : contre son corps, écrire l’histoire des putains défuntes, emportées par le séisme sous les décombres de béton. D’une surtout : la petite, la fugueuse Shakira venue sous son aile un jour dans la haine de sa bigote de mère. De la belle et orgueilleuse Shakira toute pénétrée d’une passion dévorante pour Jacques Stephen Alexis, l’immense écrivain qui fait battre le cœur d’Haïti. Shakira la révoltée devenue la plus convoitée des putains de la Grand-Rue.
Avec ce roman de feu, qui marie le Ciel et l’Enfer, la transgression par le sexe et la mort atteint à la plus authentique humanité, la plus bouleversante, celle qu’aucune morale ne contrefait.
Avec une liberté absolue de ton, Makenzy Orcel prête voix à tout un monde. « La petite. Elle le disait souvent. Les personnages dans les livres ne meurent jamais. Sont les maîtres du temps. »

bottom of page