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Éva a lu pour vous ..

Chroniques littéraires

Le Bagne des enfants - La colonie pénitentiaire de Belle-Île-en-Mer

Christophe Belser

De Borée Histoire & Documents

19 mai 2022

300 pages

Historique

Chronique

12 juillet 2022

Version illustrée. « Les enfants sont vus [...] comme des "petits vauriens », « indomptables », « absolument rebelles », « voués fatalement à la prison ou au bagne », « de vraies brutes », avec une « tare héréditaire visible sur leurs visages. » Marcel Mallat de Bassilan


« Il y a dans l'enfance, explique Léon Vidal, inspecteur général des prisons, comme dans l'homme arrivé à maturité, des caractères tellement méchants, si foncièrement vicieux qu'ils sont incorrigibles par les moyens communs, indomptables par les formes ordinaires de l'éducation. Il y a des enfants si enclins au mal qu'ils semblent destinés au crime si on ne les arrête dans cette voie par des moyens exceptionnels. »


« L'enfance coupable » donc mérite son châtiment. Dès la naissance, si celle-ci est survenue dans un cadre modeste, pauvre, ou pire, de parents délinquants ou vagabonds, encore plus si orpheline, cette enfance se voit impitoyablement condamnée par une société croyant à la prédestination, l'inéluctabilité du passage aux crimes pour des gamins et filles malchanceux de n'être pas riches et entourés d'affection. Et pour ceux qui seraient issus d'une bonne famille, à la première incartade, au premier signe d'indépendance, d'indiscipline, la justice abat le couperet... direction les bagnes pour enfants sous couvert de rééducation et d'apprentissage d'un métier.


La sidération horrifiée que l'on ressent à la lecture de ce document exceptionnel est renforcée par le ton factuel évitant tout pathos.

Un soin extrême est apporté par l'auteur à la vérité historique, à l'analyse au scalpel et au jugement sans appel de cette société corsetée dans ses certitudes inhumaines, coupable d'avoir détruit des milliers d'enfants, d'avoir fait se cotoyer des criminels notoires et des gamins innocents, d'avoir encourager la violence, la torture, la maltraitance, le viol des "colons" par le personnel ou certains caïds enfermés avec des agneaux sacrifiés. Affamés, utilisés comme de la main d'oeuvre à bas prix, certains sont tombés dans un désespoir sans fond, d'autres se sont enfuis pour être repris, suppliant le juge lors de leurs procès d'être envoyés dans une prison pour adultes loin de cet enfer.


La vérité sur l'horreur de ces colonies pénitentiaires a peu à peu éclaté grâce aux mutineries multiples, aux morts suspectes de certains enfants ou jeunes, grâce à la ténacité de certains journalistes, écrivains, hommes de bien.


Une personnalité particulièrement haïssable symbolise à elle seule la monstruosité qui pouvait régner dans ces lieux de tourmente :

L'inamovible Maxime Peyron, directeur à Belle-Île-en-Mer pendant 24 terribles années, un tortionnaire et un sadique qui grâce à ses appuis politiques ne prendra sa retraite qu'à 74 ans sans avoir jamais dû rendre compte de ses crimes.


Christophe Belser rend leurs voix et leurs noms aux victimes : Georges Goazempis, Eugène Gicquel, Mathurin Reto, Roger Abel, Maurice Pilorge....


J'ai lu ce document par petits bouts tant l'horreur décrite est insoutenable. Il faut attendre 1977 pour qu'enfin ce bagne soit fermé, mais combien d'enfants et de jeunes gens sacrifiés ! Combien de meurtriers au sein du personnel non condamnés ! Gratitude envers l'auteur pour ce travail colossal magistralement rédigé et exposé.

Quatrième de couverture

Fondée en mai 1880 dans une ancienne prison politique, la colonie agricole et maritime de Belle-Île-en-Mer accueille des adolescents âgés entre 13 et 21 ans... Des jeunes ayant été acquittés par la justice en raison de leur absence de discernement et des jeunes justiciables condamnés à des peines de 6 mois à 2 ans d'incarcération.
Se mêlent des petits vagabonds à peine sortis de l'enfance, des mendiants, des voleurs à la tire mais également de jeunes criminels multirécidivistes, coupables, pour certains, de meurtre. Leurs conditions de détention déplorables, les mauvais traitements infligés par les gardiens et la violence entre colons poussent nombre de ces jeunes prisonniers à tenter de fuir cet enfer carcéral, seuls, en groupes ou lors de révoltes et de mutineries spectaculaires.
Ce récit poignant illustré et documenté, revient sur ces épisodes dramatiques et en analyse les fondements, entre déshumanisation du système judiciaire et de ses représentants, et le profond désespoir de ces « enfants du bagne ». En 1934, Prévert écrira La Chasse à l'enfant suite à une terrible mutinerie en réaction aux souffrances endurées dans ce bagne. Ce lieu d'enfermement qui semble sorti d'une autre époque a fermé ses portes en 1977, c'était hier...

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