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Éva a lu pour vous ..

Chroniques littéraires

La Rivière de l'Oubli

Cai Jun

XO Editions

2018

481 pages traduites par Claude Payen

Polar

Chronique

12 mai 2019

L'auteur surnommé « Le Stephen King chinois « signe » un thriller aux confins du réel, tout en brossant un portrait saisissant de la Chine d'aujourd'hui.

La Rivière de l'Oubli est le roman de la vie après la mort, de la vengeance parfaite, mais aussi de cette lueur qui, toujours, finit par transpercer l'obscurité. »


Je dois dire que je suis toujours étonnée que les éditeurs puissent encore faire l'erreur d'annoncer un nouveau Stephen King ou n'importe quel écrivain célèbre. C'est à mes yeux tomber dans la facilité, prendre le lecteur pour un idiot et cela manque de respect à l'auteur de référence et le nouveau venu. Que je sache le premier n'est pas en fin de carrière et est incomparable et le deuxième a trouvé sa propre place, sa légitimité. Ce n'est pas parce que ces deux auteurs font dans le thriller fantastique, qu'ils sont à associer.


À l'opposé l'un de l'autre, en premier lieu dans la forme.

Certes tous les deux construisent un scénario extraordinaire, malin, futé, mais cela s'arrête là.

Le roman de Cai Jun est esthétiquement maîtrisé, respecte le manuel du parfait auteur de Thrillers, très intelligent, avec une bonne dose d'érudition quant à la culture chinoise et plus particulièrement la poésie, la littérature française, l'anglaise, normal puisque nous sommes plongés dans le monde universitaire, et que son héros est professeur de littérature.

La fin est absolument insoupçonnable, je l'ai lue deux fois pour prendre la mesure de ce sacré retournement, et rien que pour cela , bravo !


De plus, la description de la société chinoise, vous l'avez compris, plutôt éduquée, de 1995 à 2014 m'a passionnée : ce système de castes, cette volonté de ne jamais perdre la face, ces secrets inavouables pour rester honorable aux yeux de tous, cet acharnement à gravir les marches de la hiérarchie grâce au passage obligatoire en université, ce sentiment d'inéluctabilité, de destin déjà écrit, cette lourdeur qui pèse depuis des millénaires, ce sentiment d'être plongée dans un univers encore moyenâgeux sous bien des aspects, avec des règles d'un autre temps tout en surfant sur les nouvelles technologies, m'a donné un sentiment d'étouffement et de tristesse.


L'absence d'humour, d'expression d'affect, du recours aux sens du toucher, du goût, de l'odorat, cette mise à distance permanente dans ce récit froid, factuel, intellectuel ne m'ont pas permise de me sentir concernée émotionnellement, d'éprouver de l'empathie pour les personnages.

La beauté réside à mes yeux dans l'imperfection, le déséquilibre, mais ici ils sont évités. Maîtrise, toujours, du geste, de l'apparence... Est-ce pour renforcer le malaise généré par cette société, est-ce de la pudeur de l'auteur, ou est-ce tout simplement une incapacité à plonger dans l'abîme des sentiments ? L'émotion quand elle affleure apparaît dans les citations de poèmes célèbres , toujours esthétiquement contrôlés.


Un sacré casse tête, sans mauvais jeu de mot, mais sans l'autre dimension, celle de la beauté, de la prise de risque personnel et artistique, Il me semble du moins. Et enfin pour compléter la quatrième de couverture, il s'agit bien plus dans ce roman de possession que de réincarnation. Le garçon dont le corps va être squatté par Shen Ming va souffrir de cette occupation, c'est dit par le mort lui-même.


Donc mon avis est mitigé, une bonne copie mais pas assez personnelle, sans prise de risque. Un peu d'imperfection apporterait un supplément d'âme...

Quatrième de couverture

Chine du Nord, juin 1995. Shen Ming, jeune et brillant professeur, est suspecté d'avoir assassiné une lycéenne.
Quelques jours plus tard, il est poignardé près de l'école, dans une usine désaffectée.
Neuf ans plus tard, le mystère s'épaissit. Les présumés meurtriers du professeur sont envoyés, eux aussi, au royaume des morts.
La rumeur se répand alors : et si Shen Ming avait traversé la rivière de l'Oubli pour se réincarner et se venger ?

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