
Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
La Princesse de Clèves
Madame De La Fayette
Editions des Femmes Antoinette Fouque Bibliothèque des voix
2019
Lu par Michèle Morgan
Roman
Chronique
14 juillet 2019

Lu et interprété par Madame Michèle Morgan en 1981, mise en espace sonore par Simone Benmussa et réalisé par Michelle Muller.
J'étais tombée amoureuse de ce texte adolescente, en sixième, en raison de la beauté de la langue, sa musique.... Je le lisais et le relisais à haute voix, émerveillée... C'était proprement un plaisir gustatif.
Mais tout de même, cette femme, je ne la comprenais pas, elle m'énervait, j'avais envie d'entrer dans le livre pour la secouer, la réveiller.
Croyez-le ou non ! Près de quarante ans après je ressens les mêmes frustration et colère. Incroyable !
C'est typiquement le type de personnage que l'on retrouvera ensuite dans les liaisons dangereuses ou dans les œuvres romantiques du XIX ème siècle, qui m'ont toujours agacée.
Ce qui me rassure, après écoute de ce roman, c'est la description de l'étonnement et de l'ahurissement des contemporains de cette chère Princesse de Clèves face à son sacrifice.
Tout de même, si effectivement la société de l'époque était corsetée, si les femmes étaient enfermées dans le carcan créé par la morale, la religion, le patriarcat tout puissant, il est un fait que libérée enfin de son mari et de toute tutelle masculine, sa décision de ne pas vivre enfin pleinement est incompréhensible pour tous. Elle me laisse effarée, comme tous les témoins de ce récit.
Depuis je me pose beaucoup de questions : a-t-elle vécu quelque événement significatif dans le passé qui la bloque au moment de sauter enfin le pas ? A-t-elle peur de la liberté, du bonheur ? Est-elle masochiste ? Traîne-t-elle un sentiment de culpabilité dû à son éducation ?
Et mon envie de la secouer furieusement pour la pousser vers le bonheur me reprend. Comme quoi, Madame de La Fayette a fait mouche avec ce roman, toujours d'actualité, le premier ouvrage de la littérature française se penchant enfin sur la psychologie féminine et surtout, choisissant une héroïne et non une figure centrale masculine.
Ce qui est formidable, c'est que tout est dit voire suggéré, mais force est de constater qu'il reste toujours ce mystère final, comme un clou dans une chaussure.
Et puis.... Et puis Michèle Morgan..... Que dire.... Somptueuse ? Assurément ! Intemporelle ? Oui. D'une grande finesse d'interprétation alliant l'élégance, la justesse, la profondeur.... Du grand Art ! En dire plus serait totalement inutile, écoutez plutôt cet enregistrement qui devrait être dans chaque bibliothèque qui se respecte.
À diffuser largement, à faire écouter dès l'adolescence.... À nouveau je le répète, ici nous sommes dans le domaine de l'artisanat d'art exigeant et passionné.