Extrait : 

"C’est bien une femme, il n’y a aucun doute, pourtant elle est en train de lire. Et elle ne lit ni histoire d’amour ni vers légers ; elle lit un ouvrage de médecine. Il faut forcément qu’elle ait envie d’apprendre quelque chose de mauvais. Ou alors elle a commis un acte malin et cherche un moyen de le cacher. Oui, il s’agit d’une femme, mais pourquoi alors n’est-elle pas à la fontaine à bavarder ou au marché en train de cancaner avec ses comparses. C’est une femme en train de lire. Tranquillement. Ah mais…, il doit s’agir d’une sorcière. Oui, ce doit être ça. Elle en a tout l’air… Elle s’appelle Hélène.

Avec un livre de prières entre les mains, on ne va nulle part."

Un homme, et non des moindres, est le lien entre les trois héroïnes de ce roman somptueux : René Descartes.

Qui sont ces femmes ?

Par ordre d'apparition : 

Christine de Suède, reine singulière, érudite, curieuse, indépendante et en avance sur son temps, grande amoureuse devant l'éternel et passionnée par les idées et la philosophie. Elle invite Descartes à la rejoindre à Stockholm afin de débattre, d'échanger, de refaire le monde dans une communion d'esprit et de cœur, jamais de corps, comme certains fâcheux l'ont affirmé. Un amour réel naît entre la reine et l'intellectuel vite abrégé par le décès de ce dernier à la constitution fragile. 

En héritage, voici qu'il laisse à la monarque un paquet de lettres bien mystérieuses. 

Et voici Hélène Jans, herboriste, guérisseuse, femme des plus instruites, amoureuse de sa liberté, toujours en deuil de sa petite fille morte à cinq ans. De condition modeste, elle fut la compagne non déclarée d'un certain.... Descartes. Après le décès de leur enfant, leurs liens se sont relâchés, Hélène poursuivant sa quête de savoir. Elle souhaite laisser en legs particulier à ses "sœurs" un ouvrage précieux, le "Livre des Femmes", un herbier où figure, évidemment en bonne place, la mystérieuse Morelle noire...

La troisième silhouette s'approchant de nous est bien contemporaine et des plus énigmatiques. Qui est cette Inès Andrade, étudiante, en pleine rédaction de sa  thèse sur... Descartes ?

Comment écrire des lignes originales sur un tel sujet qui n'auraient pas encore été rédigées ? N'aurait-elle pas en sa possession un trésor particulier ? Pourra-t-elle offrir au monde, malgré le scepticisme de son mentor, une hypothèse de travail différente sur le célébrissime philosophe, bousculant tous les poncifs, effaçant toutes les certitudes, rebattant les cartes du savoir imposé ?

Une autre version de l'Histoire nous est ainsi offerte magistralement par Teresa Moure parfaitement traduite par Marielle Leroy. 

Ouvrage historique somptueux, bénéfique, d'une érudition accessible, complétant le portrait officiel du grand homme de touches féminines, nuançant somptueusement sa biographie transmise sans contestation possible depuis des siècles. 

Roman intrigant qui m'a totalement subjuguée.

À lire absolument.