Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
La Bague au Loup et Le Cyclamor
François Liensa alias Jean-François Nahmias
Fixot Compagnie 12
1987 et 1988
495 et 346 pages
Historique
Chronique
11 février 2021
Pour certains ce sont les tomes 2 et 3 de la trilogie de « L'enfant de la Toussaint », mais pour moi ce sont les tomes 3 et 4 de la série « Gueules et Sable », traitant de la Guerre de cent ans racontée au travers de la vie d'un Chevalier, François de Vivraie et de sa descendance.
Ainsi je finis la lecture de la série « Gueules et sable ». Faire l'impasse sur « La femme de sable » chroniqué précédemment serait vraiment dommage car certains passages remarquables présents dans cet opus sont absents de « La bague au Loup ». Les événements tels que narrés dans « La femme de sable » sont résumés en 239 pages seulement au début de « La bague au Loup ». Pour moi c'est incohérent sur le plan éditorial et littéraire.
Cependant cette série, du coup très longue et même quelques fois répétitive au sein d'un même tome, tant l'auteur semble craindre que le lecteur ne le suive pas, reste exemplaire quant à l'illustration fabuleuse de cent ans de notre Histoire de France ; ceci grâce à la forme romancée, respectant les codes des grandes épopées guerrières et de chevalerie présentes dans notre patrimoine littéraire pour les deux premiers tomes, puis affirmant un virage vers les récits de légendes et de magie avec ces deux derniers épisodes de l'existence de notre héros, François de Vivraie, à partir de ses 60 ans jusqu'à sa mort, peu de temps après son centième anniversaire.
Par le biais de son histoire mais aussi de celles de son frère Jean, de son fils Louis, agent secret au service du roi de France, de son petit-fils Charles, le chevalier aveugle, de son arrière-petit-fils Anne, mais aussi de son fils illégitime, Adam, porteur de la haine que voue sa mère, Mahaut, païenne psychopathe, à François et ses descendants, défenseurs de la chrétienté, l'auteur réussit à nous rendre limpide les tenants et aboutissants d'un conflit complexe aux raisons iniques et répercussions incommensurables jusqu'à nos jours.
Charles VI, le roi fou est mort. Le pays est déchiré par une guerre civile opposant les partisans du duc d'Orléans à ceux du duc de Bourgogne sous les noms d'Armagnac et de Bourguignons. La lutte est sans merci et offre aux Anglais, faisant alliance avec ces derniers, les conditions parfaites à leur victoire écrasante à la bataille d'Azincourt. Ils conquièrent ainsi tout le nord de la France, la Normandie et Paris.
L'année précédente, en 1422, avant le décès de Charles VI, les Anglo-Bourguignons avaient réussi à lui faire déshériter son propre fils au profit du roi d'Angleterre. Ainsi la France avait deux rois reconnus par chacun des deux camps : D'un côté Henri VI d'Angleterre, un enfant représenté par un régent, son oncle le duc de Bedford, et de l'autre Charles VII. Reims étant en territoire anglais,ce dernier n'a pu être sacré roi et est encore surnommé le Dauphin.
La situation est donc complètement ubuesque, le pays est entre le marteau et l'enclume, le peuple subit des ravages multiples dûs aux passages des armées, bandits et grandes épidémies. Paris reste un enjeu considérable, après que Jeanne d'Arc ait réussi à mettre sur son trône légitime Charles VII, qui pourtant se montrera bien déloyal et amnésique plus tard, abandonnant la Pucelle d'Orléans à son destin.
Loin de ces champs de bataille et d'intrigues diverses, informé des évènements politiques mais aussi de la vengeance que poursuit son fils illégitime Adam accompagné de sa femme Lilith, François de Vivraie en son château du même nom a remisé son armure à plus de soixante ans pour se tourner vers l'Alchimie, à l'instar de son ancêtre Eudes : celui-ci en effet en choisissant les couleurs rouge et noir du blason de la dynastie, souhaite allier l'image de perfection du chevalier à celle d'ermite, de l'action compagne de la réflexion, de la lumière et de l'ombre. Ainsi a-t-il donné un ordre : que ses descendants unissent et concilient les deux faces du blason au premier abord inconciliables. François va se consacrer à cette mission et cherchera en ses héritiers celui qui pourra relever le gant. Se faisant ne commettra-t-il pas une lourde erreur et ne condamnera-t-il pas ses jeunes hommes à l'enfer ? Un enfer dont Adam et Lilith semblent les maîtres incontestés.
Une reconstitution hallucinante encore une fois, des personnages de notre Histoire ressuscités avec un talent incontestable et un souci du détail, un thriller psychologique, surfant à certains moments avec le surnaturel ou en tous cas, l'inexplicable... Une fin magnifique, poétique, digne des plus grandes légendes redonnant espoir en l'avenir...