
Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
L'école de la nuit
Harold J.Benjamin
Cohen & Cohen
15 février 2024
224 pages
Historique
Chronique
22 février 2024

" Black is the badge of hell
The hue of dungeons and the school of night. "
" Noirs sont le sceau de l'enfer
La couleur du cachot et l'école de la nuit. "
Love's Labour's Lost, IV, 3, William Shakespeare
(1564-1616)
" Hell hath no limits, nor is circumscribed
In one self place. But where we are is hell
And where hell is there we must ever be. "
" l'Enfer n'a point de limite, et n'est point circonscrit
En un seul lieu. Mais l'Enfer est où nous sommes
Et là où il est, là nous serons à tout jamais. "
The Tragedy of Doctor Faustus, I, 5, Christopher Marlowe (1564-1593)
Troisième tome de la série parue chez le même éditeur. Celle-ci comprend :
Le grand effroi de John Pickett (2021)
Les Lunes de Jupiter (2022)
C'est un réel bonheur de suivre à nouveau les aventures de la famille Pickett et plus particulièrement de Tobias, avocat, fils de John, peintre, qui fut le personnage principal du premier opus.
Londres, fin du règne de Élizabeth 1ère, vieillissante, en mauvaise santé mais toujours au regard et au jugement acérés sur son temps, sa cours, ses courtisans, ses opposants, son peuple, sur la place de son royaume sur l'échiquier mondial. Elle aime jouer et se divertir ; ainsi le théâtre tient-il une place particulière en son cœur et l'arrivée d'un nouveau venu très talentueux, William Shakespeare, ne lui a pas échappé.
Harold J. Benjamin nous offre une plongée somptueuse, passionnante, stupéfiante et haletante dans les coulisses de deux maisons de théâtre, à la rencontre de leurs troupes de comédiens et techniciens.
J'ai nommé :
- Le Rose playhouse où officient les " Lord Admiral's Men ".
- Le Globe playhouse où officient les " Lord Chamberlain's Men " et notre cher Will.
À vous la découverte de l'organisation matérielle, administrative, humaine de ces deux structures, de leurs loges, des artisans et artistes qui y vivent et y travaillent.
Enthousiasmant !
Les bâtiments ronds en bois sont montés sur des terrains loués par leurs directeurs pendant un certain temps. Si le propriétaire du dit terrain veut le récupérer à la fin du bail, le démontage et le déménagement de l'édifice sont nécessaires. Ainsi les deux théâtres éloignés l'un de l'autre en ce début de récit, se retrouvent-t-ils voisins en raison des aléas de la vie difficile des playhouses, juste avant les premières disparitions d'une costumière, Hannah, et de son amoureux, Martin, comptable et acteur, après une représentation du Doctor Faustus de Christopher Marlowe au Rose playhouse.
Peu de temps après, un corps casqué encore dans le costume porté par Martin est retrouvé dans le terrain voisin où est remonté le Globe playhouse.
Tobias Pickett est appelé sur place et mandaté pour découvrir la vérité. Au même moment, lui et sa famille se voient obligés de répondre d'accusations calomnieuses de magie noire et d'abus par une certaine Agnes Bishop.
Il sont, semble-t-il, dans le collimateur d'un juge de paix, Richard Harclyff. Mais pourquoi ?
Alors que le peuple crie famine, que le pouvoir dictatorial écrase toute opposition, et que la guerre en Irlande prend de l'ampleur, le monde du théâtre bruisse de mille sons inquiétants. Un brouillard de suspicion, de peur l' enveloppera pendant plus de six mois pendant lesquels Tobias devra résoudre les énigmes de la mort de Martin, de la disparition de Hannah et d'un deuxième meurtre, tout aussi étrange.
L'atmosphère anxiogène, paranoïaque et venimeuse de cette période élisabéthaine cependant si attractive et brillante, est toujours aussi parfaitement rendue par Harold J. Benjamin. Tout n'est qu'apparence, comédie de société, complots et vanités dans ce thriller historique.
La dernière scène finale avant l'épilogue est fabuleuse : les pièces du puzzle se mettent en place sous nos yeux émerveillés, petites miettes de pain que l'auteur avait patiemment laissées sur notre chemin.
Écoutez ! Les trompettes retentissent ! Bientôt le spectacle va commencer.
Pénétrez dans l'école de la nuit !
Merci à Harold J. Benjamin pour sa confiance renouvelée.