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Éva a lu pour vous ..

Chroniques littéraires

Carthage

Irene Vallejo

Albin Michel

20 août 2025

288 pages traduites par Bernadette Engel-Roux

historique

Chronique

6 octobre 2025

Paru aux Éditions Albin Michel/Les Belles Lettres, dans la collection " Les Grandes Traductions "

 

Titre original : El silbido del arquero 

 

1ère sélection Prix Femina étranger 2025

Palmarès Livres Hebdo des livres préférés des libraires.

 

« Ce roman poétique [...] joue avec la beauté des mots pour réinterpréter l'histoire racontée par Virgile dans l'épopée de L'Énéide, et la transformer en un poème épique singulier. »

El Correo

 

" Certaines victoires ne sont ni glorieuses ni mémorables ; mais certaines défaites peuvent se faire légendes, et de légendes victoires "

Ana María Matute, " Gudú, le roi oublié "

 

" Ceux qu'aujourd'hui nous nommons héros ont été un jour des êtres fouettés par le malheur. De la vendange de la souffrance jaillit le vin des légendes. "

 

Un roman comme une longue et splendide incantation ressuscitant pour nous les figures mythiques et héroïques de notre enfance, permettant au souffle de l'Histoire et de la Légende de s'élever à nouveau, nous enveloppant des parfums d'hier, nous laissant à percevoir les voix chuchotantes, les cris de douleur ou de plaisir, les rires parfois. 

 

Ainsi se dressent devant nous la reine Didon ici Elissa, fondatrice de Carthage ayant fui Tyr et son frère après l'assassinat de son époux, Enée fils de déesse, ayant réussi à sauver son fils Iule (Ascagne) et son père en embarquant avec des soldats rescapés de la guerre de Troie sur des navires de fortune. 

Ana, la jeune demie sœur d'Elissa, voue à cette dernière un amour sincère, un immense respect, et une profonde gratitude ; en effet c'est elle qui lui a sauvé la vie, l'emportant dans sa fuite éperdue. Elles restent traumatisées de ces années de peur sous le joug d'un frère dictateur. La jeune fille douée du don de prophétie, enfant adultérin d'une sorcière, craint toujours que celui-ci les retrouve et les massacre. 

 

Un autre personnage capital entre bientôt en scène, Éros, le dieu favorisant l'amour entre les humains par ses subterfuges, par sa seule volonté. Mais les hommes réussissent quelques fois à garder, malgré tout, le contrôle sur leur existence et de cela, il va en être témoin. 

 

Une tempête, des bateaux qui échouent fracassés sur les plages carthaginoises, Ana présente telle une vigie, inquiète de la dangerosité possible des rescapés du naufrage... Le destin est en marche ! 

Sont-ce les Dieux ou les hommes qui décident du futur des héros ? 

Combien de malheurs et de souffrances indicibles se cachent derrière l'image triomphante que nous gardons des figures légendaires créées, magnifiées par Virgile et bien avant lui, Homère ?

 

J'ai interprété Cassandre puis Didon dans l'opéra "Les Troyens" de Hector Berlioz. Ma connaissance donc de ces femmes est totalement intériorisée, intime, inscrite dans ma chair. 

J'ai retrouvé ici la puissance du texte des dramaturges et poètes précités, la beauté extrême du livret rédigé par le compositeur. Mais surtout, grâce à ce roman splendide, j'ai pu compléter mes connaissances quant à l'avenir d'Ana, Iule et Enée et m'attacher au personnage de Virgile, hanté par sa mission, malade de crainte lors de la maturation du texte, désespéré par le cynisme et la cruauté de son temps, dégoûté par sa propre allégeance à Auguste, son terrible mécène souhaitant ainsi que la légende de son ancêtre Iule soit écrite pour la postérité. 

 

Sommes-nous, à l'instar de ces héros, les jouets du destin ou pouvons-nous choisir le chemin que nous souhaitons emprunter ? 

 

La tendance actuelle est à réécrire les textes mythiques, à mettre en scène les héroïnes célèbres de l'antiquité, victimes d'un carcan patriarcal. Le but, en cette période de métamorphose de notre monde, est de mieux comprendre et déconstruire certaines idées reçues et diffusées depuis des millénaires, enfermant chacun de nous, hommes et femmes, dans des rôles prédéfinis aujourd'hui insupportables. 

 

Dans "Carthage", la parité est complète : Elissa, Enée, Ana et Iule sont tous quatre emportés par les évènements, tous acteurs de cette tragédie à part égale. 

 

Somptueux ouvrage d'une magnificence crépusculaire à mettre absolument entre toutes les mains. Une mention spéciale pour la beauté de la traduction de Bernadette Engel-Roux.

Quatrième de couverture

Après avoir fui le pillage de Troie avec son fils et ses hommes, Énée fait naufrage sur les rivages de Carthage. Son destin est entre les mains de la reine Elissa, également connue sous le nom de Didon, et de l’espiègle dieu Éros, déterminé à tirer ses plus belles flèches pour faire naître l’amour entre les deux héros.
Des siècles plus tard, Auguste demande au poète Virgile d’écrire le récit des épreuves d’Énée, à l’origine du mythe fondateur de la civilisation romaine. Mais Virgile ne parvient pas à répondre au désir de l’empereur. Ce qu’il veut raconter, ce n’est pas le courage des hommes et le destin épique de Rome, mais la souffrance, l’incertitude et la peur des naufragés. Parce qu’il sait que « la défaite est toujours le point de départ d’une grande histoire ».
Mêlant les voix des protagonistes de l’épopée à celle de Virgile en proie au doute, Irene Vallejo réinvente le mythe avec les mots d’aujourd’hui, livrant une réflexion moderne sur la place des femmes, le pouvoir, le destin et la nature du coeur des hommes.
Récit d’aventures, de guerre, d’exil et d’amour, ce premier roman de l’autrice de L’Infini dans un roseau est un miracle de beauté, empreint de poésie tragique.

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