Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
Ca ne coûte rien de demander
Sara Lövestam
Robert Laffont La Bête Noire
2018
380 pages traduites par Esther Sermage
Polar
Chronique
21 octobre 2018
Le premier volet de cette tétralogie sous le titre « Chacun sa vérité » a reçu le prix de l'Académie suédoise des auteurs de polars 2015 et le Grand Prix de la littérature policière 2017.
« Née en 1980, considérée comme l'une des nouvelles voix littéraires suédoises, Sara Lovestam est l'auteur de trois romans parus aux éditions Actes Sud : Différente (2013), Dans les eaux profondes (2015) et en route vers toi (2016). Grâce à des personnages souvent en marge ou en quête d'identité, elle réussit à mettre subtilement en lumière les enjeux actuels de notre société, et amène ses lecteurs à questionner l'ordre établi. «
J'ajoute car cela est tout de même central dans ce policier, que Sara Lovestam est très engagée dans la cause LGBT, et prête sa voix et sa notoriété à la lutte contre l'exclusion et l'homophobie. Donc certes ce livre décrit la société suédoise mais s'attache aussi à mettre en scène principalement des lesbiennes et un trans. Ne pas le mentionner me semble bien dommage d'autant plus que ces éléments sont centraux afin de comprendre les tenants et enjeux de ce récit.
« Si la police ne peut rien pour vous, n'hésitez pas à faire appel à moi »
Annonce de Kouplan, détective sans-papiers.
Une sacrée trouvaille que ce héros borderline, à Stockholm, se cachant de la police sa demande d'asile de réfugié iranien en danger chez lui ayant été refusée. Ancien journaliste, il est au début de ce roman au bout du bout, rendu à récolter des canettes vides pour se faire quelques argent. Un jour, il entend alors qu'il fouille dans une poubelle du quartier chic de Lidingo la conversation téléphonique d'une femme, riche vraisemblablement et autoritaire, en rage de s'être faite arnaquée.
Kouplan n'ayant rien à perdre, ose le coup de bluff et se présente à elle comme détective privé. Il lui propose ses services.
D'abord méfiante et réticente, Jenny Svard, conseillère municipale ambitieuse, fuyant toute forme de mauvaise publicité, l'engage.
Son amante depuis dix mois a disparu, lui escroquant au passage 200 000 couronnes.
Je dois dire que j'ai trouvé le montage du scénario très intelligent et futé, la découverte de la vie des immigrés clandestins ou non en Suède frappante, l'analyse psychologique de chacun et particulièrement de Kouplan très fine et pertinente. Enquêter tout en devant se cacher des forces de l'ordre, et faire un travail considérable sur soi-même quant à sa propre vérité n'est certes pas commun.
Tous dans ce roman mentent, présentent un certain visage, sauf un finalement notre héros touchant, honnête, en quête d'authenticité.
Je suis en revanche déçue de la fin, j'attendais une conclusion plus « remarquable » à l'image de ce polar atypique tout du long.
Je ne sais plus du coup si j'ai lu un policier ou un roman sociétal. Un peu des deux certainement, mais j'aurais souhaité un peu plus de frissons. C'est dommage, il aurait vraiment fallu un coup d'éclat pour couronner un livre par ailleurs brillant et passionnant sur bien des plans.