
Éva a lu pour vous ..
Chroniques littéraires
La dernière allumette
Marie Vareille
Charleston
Le 1er mars 2024
336 pages
thriller
Chronique
20 février 2025

" Un oiseau né en cage pense que voler est une maladie. " Alejandro Jodorowsky
" L'adulte, c'est certain, indirectement, a montré que faire le mal, c'est bien." IAM, " Petit frère "
" Article 371-1 du Code civil, lu lors de la célébration d'un mariage :
L'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant. Elle appartient aux parents jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne. "
L'autrice de ce thriller sociétal, familial et psychologique dont l'intemporalité est totalement insupportable, le dédie non aux enfants d'hier et d'aujourd'hui victimes directes ou collatérales de la violence parentale, mais à son père, avec tendresse et reconnaissance :
" Au petit garçon de Sarcelles,
devenu fabricant d'ailes,
à l'ingénieur expert,
en rêves fouq et divers,
celui qui, il y a trente-neuf ans,
a attaché ses plus belles plumes
à mes épaules d'enfant,
avec des vis et des boulons,
parce que trop près du soleil,
la cire, ça fond ...
Bref,
À mon Papa. "
Et je me dis : "Quelle chance elle a eu ! Comme j'aurais aimé moi-aussi m'envoler grâce à des ailes solides vers un avenir passionnant, forte de tout l'amour reçu petite...."
Et puis je pense : " Elle est sacrément forte, cette Marie Vareille, pour avoir tout compris de mon chagrin, de celui des milliers de petites victimes muettes, terrifiées, maintenant adultes fragiles, bancales, parfois amnésiques, parfois omniscients, toujours terrifiés les poings levés. "
J'ai été bluffée par l'empathie et la justesse de l'analyse psychologique par l'écrivaine de chaque intervenant de ce récit énigmatique, terrifiant, coup de poing dans le cœur, le ventre, éclairant des zones de ténèbres intimes qu'il est presque toujours impossibles de dévoiler, ménageant un suspense tendu jusqu'à la dernière ligne et des retournement de situation imprévisibles. On imagine le pire des scénarios sur un simple mot mais on se fourvoie et hop, nous voilà embarqués sur un autre chemin. Quelle adresse !
La voix des enfants par celle d'Abigaëlle résonnent enfin pour raconter ce qui se tait, ce qui se cache derrière les murs de maisons insoupçonnables d'où pourtant s'échappent quelques fois des cris, des pleurs, des gémissements. L'aveuglement et la surdité de certains voisins, certains éducateurs ou membres de la famille m'ont toujours stupéfaite, et ici encore, ce phénomène est parfaitement décrit...
On assiste au drame par les yeux de l'enfant mais aussi de celle qu'elle est devenue des décennies plus tard.... Et elle nous parle aussi de son grand frère, Gabriel, au nom prédestiné, celui qui met des étoiles, qui métamorphose un mot laid en mot beau et tendre, créant un quiproquo magique, consolateur, protecteur...
Mais est-il si angélique ce garçon ? Quel homme est-il aujourd'hui ? Quel compagnon et père peut-il être ? Abigaëlle a-t-elle raison de nous alarmer, de nous inquiéter quant au devenir de Zoé, sa femme ? Abigaëlle a-t-elle tout compris du danger que court cette dernière ou sa mémoire flageollante lui fait-elle mal interpréter les évènements ?
En bref : le Mal se passe-t-il d'une génération à l'autre comme un héritage immuable, incontournable, une malédiction ?
Il suffit d'une dernière allumette pour éclairer votre chemin vers la compréhension !
Vigilance toujours...